C'est l'histoire d'un reve américain, celui d'un acteur incertain, né en 1907, qui gravit un a un les échelons pour se hisser durablement au firmament de Hollywood. Marion Morrison, qui se fait appeler Duke, passe le balai sur les plateaux quand John Ford le repere. Grâce a ce mentor, sévere figure paternelle, le colosse maladroit aux yeux clairs, qui enchaîne les westerns fauchés pendant une décennie, finit par imposer son double de cinéma. L'indomptable John Wayne promene alors sa démarche chaloupée et son jeu nuancé au fil d'une impressionnante filmographie - de La chevauchée fantastique a Rio Bravo -, jusqu'a se fondre avec la légende meme de l'Ouest. Mais alors que d'autres stars s'engagent lors de la Seconde Guerre mondiale, lui renonce, profitant d'opportunités de rôles qui le propulsent bientôt au zénith de la popularité. Une dérobade qui restera comme une douleur lancinante et qu'il tentera d'effacer en professant un ferme patriotisme, jusqu'a l'obsession. Inlassable soldat héroique a l'écran (d'Iwo Jima aux Bérets verts qu'il réalise et produit) et zélé serviteur du maccarthysme pendant la guerre froide, John Wayne, figure mythique, a porté haut l'Amérique et ses valeurs, dans des postures ultraconservatrices. Une idéologie en rupture avec les idéaux de la jeunesse de l'époque : le héros, archétype du mâle viril et fier propagandiste de la guerre du Vietnam, a vieilli. Monument felé Au fil de témoignages de proches et d'extraits de films minutieusement choisis, Jean-Baptiste Péretié signe un passionnant portrait politique du charismatique acteur, dévoilant, derriere le monument John Wayne, les felures du Duke. Si le film ne ménage pas la star en proie a un aveuglement patriotique, le lonely cowboy hanté par le remords touche, comme son attachement filial a John Ford, qui lui offrira le rôle de L'homme tranquille qu'il n'était pas. Quarante ans apres sa mort, le parcours, entre gloire et culpabilité, d'un géant hollywoodien qui livrera avec panache sa derniere bataille contre le cancer.